Patrimoine : une aventure humaine

Le canal de Craponne

En construisant son canal, Adam de Craponne cherche à pouvoir disposer d’eau en quantité et toute l’année. Certes, des rivières ruisselaient dans le Pays Salonais, mais ces cours d’eau étaient très irréguliers et parfois à sec l’été. L’idée ingénieuse d’Adam de Craponne fut d’aller prendre l’eau dans une rivière dont le débit est beaucoup plus abondant. Le projet consiste à dériver une partie de l’eau de la Durance pour se déverser dans le canal et suivre un nouveau courant jusqu’à l’étang de Berre.

L’eau de la Durance était déjà utilisée au Moyen Âge par des riverains. Craponne a montré ses compétences en matière de maîtrise de l’eau en dérivant cette eau de Durance sur une longue distance, car la difficulté majeure est bien de capter et dompter cette eau de montagne si capricieuse. Une rivière qui charrie de grandes quantités de limon…

Adam de Craponne affronte toute ces difficultés et choisit de faire une prise d’eau latérale sur un point de la rive correspondant à une largeur normale de la Durance. Déterminer ce lieu de prise d’eau est essentiel pour garantir une alimentation en eau en toute saison. L’idée de génie de Craponne réside certainement dans cette installation.

Avant la construction du Canal de Craponne, les prises en Durance étaient constituées d’un simple barrage de dérivation. Adam de Craponne améliore le système car la prise de son canal se compose d’un barrage, d’un chenal mais surtout d’une martellière.

Le canal de Craponne est un fossé en terre sur presque toute sa longueur. Sur sa rive gauche, il suit la colline partout où elle est présente, il serpente à flanc de coteau. Son tracé est constitué de méandres, contournant les lieux élevés.

La branche mère ou tronc commun mesurait un peu plus de 23 km.

Du seuil de Lamanon à l’étang de Berre, le canal parcourt environ 40 km. Le cours initial du canal atteint donc soixante-deux kilomètres depuis sa prise en Durance jusqu’à la mer. Mais prolongé par sa branche d’Arles de 45 km et celle d’Istres, il est en réalité plus long encore.

L’œuvre de Craponne développe au total un réseau d’environ 145 km auquel il faut ajouter une longueur considérable de canaux secondaires destinés à l’irrigation.

Le saviez-vous ?

Qu’est-ce qu’une Martellière ?

Le mot martellière définit de façon générale toute construction en maçonnerie équipée de glissières pour y placer des vannes. Les martellières transversales barrent le canal sur toute sa largeur et, au moyen de ces vannes, on peut définir le niveau d’eau. Les martellières latérales ont comme fonction la distribution de l’eau auprès de ses utilisateurs.

Il y aurait plus de 100 000 martellières
dans la plaine de la Crau !

Martellière au Domaine du Merle, 2022

Aujourd’hui l’ensemble du réseau du canal de Craponne sert à l’irrigation, mais dans l’histoire du canal, deux usages essentiels ont dominé : non seulement irriguer mais aussi faire tourner les moulins des moulins à eau pour produire des farines, de l’huile…

Ainsi, l’arrivée de l’eau de la Durance permet de mettre en culture des espaces qui ne l’étaient pas. La mise en place des prairies en Crau connaît ses balbutiements à la fin du XVIe siècle. En effet, un acte de promesse d’eau fait par Adam de Craponne à Antoine de Cordes coseigneur d’Aurons, en 1571, mentionne la création d’un prêt de 20 soucherées en Crau. Adam de Craponne participe lui-même à la mise en culture de parcelles de Crau.

Adam de Craponne est un précurseur. Il a l’ambition de développer l’agriculture grâce à l’irrigation, en particulier en Crau. Quelques défrichements commencèrent, mais l’ingénieur ne put conduire son projet à terme, faute de temps et d’argent. Mais cette volonté de mettre en culture de nouveaux espaces agricoles se poursuit après lui.